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Circulaire n° 299 - Fonctionnement des traducteurs, interprètes et traducteurs-interprètes jurés

La présente circulaire a pour objet d'améliorer la collaboration entre les traducteurs, interprètes et traducteurs-interprètes jurés et l'ordre judiciaire. Moniteur belge du 1 juillet 2024.

2024005301

Service public fédéral Justice

Circulaire n° 299 Fonctionnement des traducteurs, interprètes et traducteurs-interprètes jurés

Madame le Premier Président près la Cour de cassation,
Monsieur le Procureur général près la Cour de cassation,
Madame et messieurs les Premiers Présidents des cours d'appel,
Messieurs les Premiers Présidents des cours du travail,
Messieurs les Procureurs généraux près les Cours d'appel,
Monsieur le Procureur fédéral.

A l'attention de
Mesdames et Messieurs les Magistrats-chefs de corps,
Mesdames et Messieurs les Greffiers en chef et les Secrétaires en chef,
Mesdames et Messieurs les Greffiers et les Secrétaires de parquet,
Les membres des bureaux de taxation et de liquidation,
Les unions professionnelles des traducteurs, interprètes et traducteurs-interprètes jurés

Tous les traducteurs, interprètes et traducteurs-interprètes jurés

Résumé : La présente circulaire a pour objet d'améliorer la collaboration entre les traducteurs, interprètes et traducteurs-interprètes jurés et l'ordre judiciaire.

Contexte

Depuis 2022, une concertation structurelle est organisée entre les unions professionnelles des traducteurs, interprètes et traducteurs-interprètes jurés, des représentants de l'ordre judiciaire, Team Support et la cellule stratégique du ministre de la Justice. La présente circulaire est le résultat des négociations intervenues dans le cadre de cette concertation structurelle et a pour but d'améliorer le travail des traducteurs, interprètes et traducteurs-interprètes jurés et de l'ordre judiciaire.

1. Processus numérique

A.Communication des traductions par voie numérique

A.1. Par les traducteurs

Souvent, les traducteurs doivent encore remettre leurs traductions par courrier ou en personne à leur autorité mandante. Cela engendre des frais de déplacement supplémentaires, une perte de temps mais également des frais d'impression supplémentaires et/ou des frais de port pour les traducteurs mêmes. L'objectif est que les traductions soient transmises par voie numérique aux autorités mandantes. D'ailleurs, des fichiers volumineux peuvent aujourd'hui déjà être transmis par les traducteurs via JustSendIt. C'est pourquoi il importe, pour l'instant, encore que l'autorité mandante mentionne clairement dans sa réquisition l'adresse e-mail à laquelle la traduction peut être envoyée.
A partir de l'automne 2024, les traducteurs devront transmettre leurs traductions via JustDeposit. A terme, il ne sera donc plus possible de transmettre des rapports par e-mail, mais uniquement via JustDeposit.

A.2. Par l'autorité mandante

Trop souvent, l'autorité mandante transmet encore des textes/dossiers à traduire par courrier. Un temps précieux s'écoule entre la date de la réquisition et l'arrivée des documents par courrier. En outre, les données de contact (numériques) font également souvent défaut, ce qui pose des difficultés au traducteur pour joindre l'autorité mandante.
Il importe également que l'autorité mandante communique les textes à traduire sous une forme clairement lisible et éditable de sorte que le traducteur ne doive pas consacrer du temps supplémentaire à la mise en forme de la traduction.

B.Signature numérique

Pour la transmission de la traduction numérique, la présence de la signature électronique du traducteur suffit. Il n'est pas nécessaire d'imprimer la traduction et d'y apposer une `signature physique'.

C. Traducteurs, interprètes et traducteurs-interprètes étrangers
Les traducteurs, interprètes et traducteurs-interprètes résidant à l'étranger doivent introduire leur état de frais au bureau central des frais de justice.

2. Impossibilité d'encore transmettre des traductions au bureau de taxation

Dans le cadre de la nouvelle application JustInvoice, le Data Protection Officer du SPF Justice a rendu un avis négatif sur la `poursuite du traitement' des rapports d'experts judiciaires ou des traductions de traducteurs-interprètes jurés.
Ces informations sont disproportionnées et ne sont pas nécessaires pour procéder à la taxation et à la liquidation.
Ainsi, nous nous alignons sur l'avis de 2019 de l'Autorité de protection des données dans lequel elle estimait que la transmission de traductions n'était pas proportionnelle.
Il est donc absolument indispensable que l'autorité mandante mentionne, dans son document d'approbation, le nombre de mots traduits qu'elle approuve.

3. Désignation traducteur - urgence - attentes réalistes

Concernant les traductions, il importe que l'autorité mandante fasse preuve de réalisme dans la fixation du délai pour la traduction.
Selon des normes appliquées à l'échelle internationale, un traducteur peut traduire 300 mots par heure, avec un maximum de 2100 mots par jour.
Lors de la rédaction de l'arrêté tarifaire en 2016, il a été tenu compte de 2100 mots (= +/- 7 pages) pouvant être traduits par un traducteur en une journée de travail.
Ce nombre de mots par jour correspond à ce qui est précisé dans le vade-mecum `Marchés publics.' de la Chambre belge des Traducteurs et Interprètes : « Dans des conditions de travail normales, un traducteur peut traduire, par jour, entre 2 000 et 2 500 mots d'un texte de difficulté moyenne. »
Cette ligne directrice permet de donner une indication pour les missions non urgentes.
Pour une traduction de +/- 10 000 mots, un délai d'une semaine de travail peut être convenu dans la réquisition du magistrat. Quand une réquisition ne mentionne aucune date, un délai d'un mois s'applique pour les traductions de moins de 30 000 mots ou 3 000 lignes et un délai de deux mois si l'on excède ces nombres.
Si le délai et le volume de travail ne sont pas en adéquation, l'autorité mandante peut convenir d'un délai spécifique avec le traducteur. L'intégration de ces dispositions dans la présente circulaire permet de créer un modèle plus efficace et plus réaliste quant aux attentes de l'autorité mandante et du traducteur.
Les autorités judiciaires peuvent établir une estimation du nombre de mots à traduire avant d'envoyer une réquisition.
Si le nombre de mots à traduire excède 2 100 mots par jour ou 210 lignes par jour, le magistrat peut, en fonction de la date à laquelle la traduction doit lui être remise, considérer la possibilité de faire appel à plusieurs traducteurs.
Si ce n'est pas possible, le magistrat doit indiquer clairement dans sa réquisition :
- la date à laquelle la traduction doit être remise ;
- le motif du délai : par exemple, un risque de dissimulation d'éléments de preuve, la mise en danger d'autrui, le respect de délais légaux tels que la prescription, la détention préventive, etc.

4. Appel aux interprètes

A. Dans le registre

L'appel à un interprète doit se faire en consultant le registre national des traducteurs et interprètes jurés. Ce registre est reconnu comme source authentique. Seul ce registre connaît donc un aperçu mis à jour et présente de manière claire les combinaisons linguistiques pour lesquelles un traducteur ou un interprète est assermenté.
Lorsque l'on consulte la banque de données interne du registre national, certaines inscriptions sont en vert, d'autres pas. Le vert indique les personnes qui ont déjà été admises à titre définitif dans le registre national. Mais une personne qui ne figure pas en vert peut également être désignée valablement. Ce scénario disparaîtra évidemment au fur et à mesure que le registre provisoire s'éteindra.
Par cette circulaire, nous insistons également sur la nécessité d'essayer de recourir également à des interprètes auxquels il est moins souvent fait appel. Il est important, en effet, que des interprètes inexpérimentés apprennent la profession et bénéficient d'opportunités, ce afin de garantir l'arrivée de nouveaux interprètes.

B. En dehors du registre

Lors de la désignation d'un traducteur ou d'un interprète en dehors du registre national, il importe de motiver cette désignation conformément à l'article 555/15 du Code judiciaire. En effet, l'article 555/15 in fine dispose ce qui suit : « Un extrait de la décision mentionnant l'identité de l'expert judiciaire ou du traducteur, de l'interprète ou du traducteur-interprète juré ainsi que la motivation sont communiqués au Service public fédéral Justice. »
Occasionnellement, du personnel judiciaire intervient en qualité de traducteur-interprète. La règle veut que l'impartialité prime tout et que donc on ne puisse certainement pas être désigné au sein de son propre parquet ou tribunal. Pour étayer cela par un exemple concret, il ne peut être question, par exemple, qu'un collaborateur du greffe du tribunal de police intervienne dans le cadre d'une affaire traitée par ce même tribunal de police. Cela s'avère toutefois exceptionnellement possible si le collaborateur intervient dans le cadre d'une affaire pendante devant un tribunal du travail.

5. Remise de l'approbation

Dans l'intérêt d'un paiement rapide des traducteurs/interprètes, il importe que l'autorité mandante donne rapidement son approbation pour la prestation. Sans cette approbation, un traducteur ou un interprète ne peut pas introduire de dossier au bureau de taxation et ne peut donc pas être payé.
Les interprètes requis verbalement pour une mission doivent toujours recevoir une réquisition écrite, même si la mission n'a pas lieu. Ainsi, dans ce dernier cas, ils peuvent faire valoir leur droit à une annulation.

6. Dispositions relatives à la sous-traitance

L'article 10 de l'arrêté royal fixant le code de déontologie des traducteurs, interprètes et traducteurs-interprètes jurés dispose que : « Si un travail en équipe est requis pour mener à bien la mission de traduction ou d'interprétation, le traducteur ou interprète peut, moyennant l'autorisation de l'autorité mandante, partager des informations pertinentes avec d'autres traducteurs ou interprètes de l'équipe chargée de la mission. Dans ce cas, toute l'équipe est tenue par le devoir de discrétion. »
Il est toutefois inacceptable sur le plan déontologique que des traducteurs jurés fassent appel à des traducteurs non jurés pour exécuter une mission de traduction jurée. Le SPF Justice contrôlera strictement cet aspect.

7. Briefing des interprètes avant une audience

Si possible, le magistrat charge son greffier de donner aux interprètes un court briefing à leur arrivée sur l'affaire ou au moins de leur communiquer le sujet de l'interprétation et la personne pour laquelle elle doit se faire. Pour un interprète, il y a une grande différence entre interpréter dans une affaire de vol à la tire ou dans une affaire d'abus sexuel.
Il est recommandé au greffe de mentionner la nature de l'affaire dans la réquisition.

8. Utilisation de l'équipement de chuchotage

Dans le cadre d'un procès d'assises ou de procès dont les débats durent une journée complète voire plusieurs jours, l'entité locale peut louer un équipement de chuchotage de manière à permettre à l'interprète d'interpréter dans de bonnes conditions. Les frais sont remboursés via le système des frais de justice.
Si un interprète dispose personnellement d'un équipement de chuchotage, il peut évidemment toujours l'utiliser. Cette pratique doit être encouragée car ne peut que favoriser la qualité de la traduction orale et ainsi améliorer l'administration de la justice.

9. Informations complémentaires

Pour toutes informations complémentaires, vous pouvez vous adresser au service Partners de Team Support via :
NRBVT-RNTIJ@just.fgov.be
T nl : +32(0)2 552 28 40 ou +32(0)2 552 28 57
T fr : +32(0)2 552 28 56 ou +32(0)2 552 26 29

10 Entrée en vigueur

La présente circulaire entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge.

P. VAN TIGCHELT,
Ministre de la Justice

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